Le 9 novembre 2015, quelques jours avant la France, le Tchad décrétait l’état d’urgence dans la région du Lac Tchad frontalière notamment du Nigeria suite à des tueries attribuées au groupe Boko Haram. Le Mali leur emboîtait le pas le 21 novembre à la suite de la prise d’otage à l’hôtel Radisson Blu. A Djibouti, le dictateur Ismaël Oumar Guelleh décrétait à son tour l’état d’urgence le 24 novembre.
Dans l’ensemble de ces pays, les textes qui encadrent l’état d’urgence sont identiques au mot près à la loi française, ne différant que dans la dénomination des territoires concernés et quelques autres spécificités nationales. C’est l’illustration du lien de dépendance maintenu par le colon qui a dépêché des conseillers juridiques auprès des gouvernants vassaux mis en place à la décolonisation, générant des constitutions identiques à celle de la Vème république. Comme d’autres dispositifs instaurés au nom de la lutte contre le terrorisme, l’état d’urgence dans les pays africains est aujourd’hui bien souvent l’occasion d’une communication à destination de la « communauté internationale » pour montrer la solidarité dans une lutte globalisée. Il fournit notamment des arguments aux autorités françaises dans leur soutien à des régimes dictatoriaux comme celui du Tchad, présentés positivement comme remparts face au terrorisme.
À Djibouti, où le dernier attentat remonte à mai 2014, le régime a directement instrumentalisé les exemples français et malien, au nom d’une « menace globale », mettant en oeuvre une décision préparée en réalité depuis le mois de juillet en prévision des élections à venir, comme l’avait dénoncé alors des militants djiboutiens. L’état d’urgence y a effectivement permis de réprimer dans le sang l’opposition, qui n’a ainsi pas la moindre chance aux élections à venir. Les rares députés de l’opposition ont même été exclus manu militari du vote de prolongation de l’état d’urgence au Parlement le 30 décembre.
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