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De la non mixité ( 1er partie)

Retour sur la pratique de la non-mixité et sur la fausse polémique de cet été concernant le camp décolonial qui était organisé au Centre International de Séjour de Reims.

Cet été à Reims on a beaucoup parlé de la non mixité. Pour nous, BWitches, c’est un critère fondamental car il est la base de notre crew. On a fait le choix conscient de se retrouver entre meufs afin de lutter contre le sexisme et le patriarcat. Il reste bien évidement bien d’autres critères de différences entre nous, que ce soit dans nos sexualités (hétéra, bi, gouine), dans nos genres (cisgenre & transgenre) et dans encore une myriade d’autres domaines (classe, race*, affinités politiques, …). Mais cette non mixité que nous avons choisie pour lutter contre ce qui nous oppresse a bien été un outil qui a fait ses preuves. Dans nos réunions où nous avons pu entendre les mêmes situations et les mêmes habitudes que nous n’avions jamais osées énumérer en mixité et que nous pensions être de l’ordre proprement personnel.On a pu se rendre compte que dans bien des cas c’était vraiment la même chose pour toutes parce que justement ce qui se passe n’est que le maillage que tricote le patriarcat dans nos vies. Emmitouflées dans cette armature, on n’avait jamais eu l’occasion de faire ce partage et de pouvoir bien démêler des problèmes bien spécifiques.

Pour celleux qui n’en aurait encore jamais entendu parler, la non mixité est le fait de faire le choix de se retrouver entre personnes concernées pour parler d’un problème ou faire une activité. Cela peut-être fait de temps à autres ou être la base d’un groupe (comme pour les BWitches). Elle peut après être ouverte à des moments en mixité ou non. Là encore, pour exemple, notre crew est dans sa composition non mixte mais notre zine ou certaines de nos actions publiques peuvent être mixtes selon ce que l’on choisit d’en faire ressortir et ce que l’on trouve le plus pertinent.

Je ne le dirai jamais assez, la non mixité est un outil qui, du coup, peut ensuite se décliner sous formes pluriels. J’ai vu de la non mixité femmes, de la non mixité personnes trans, de la non mixité travailleurSEs du sexe, de la non mixité survivantes …
Mais attention, là encore pour moi, cet outil ne peut pas aller dans n’importe qu’elle main. Il appartient aux oppriméEs, aux laisséEs pour compte, à celleux qu’on ne voie pas ou qu’on essaye de pas voir. De la non mixité d’homme blanc bourgeois revendiquée serait ridicule même si on en trouve dans la cité, dans la plupart des sphères de pouvoir, quelque soient les domaines. Mais, comme souvent, ce qui n’est pas nommé ne peut pas poser problème, surtout quand tout cela suit la norme établie, surtout quand on essaye de nous faire croire qu’elle est tombée naturellement du ciel. Pourtant, un groupe non mixte d’hommes pour parler du sexisme et de l’impact du patriarcat sur leurs vies ne me pose pas problème (vous voyez , pour une soi-disante féminazie°°) parce que, déjà, on pourra espérer voir dans ce cadre une petite diversité (classe, sexu, race*) et que le but est justement de déconstruire et pas de se coopter entre privilégiés (car dans une société patriarcale, un homme, quel qu’il soit aura plus de valeurs que l’ensemble des femmes).

A Reims, c’est le camp d’été décolonial qui a fait apparaître par magie toute une ribambelle de personnes luttant contre le racisme, le soi-disant communautarisme et autres belles valeurs de la république blablabla.
Outre le fait que je trouve dommage de ne voir ce genre de lever de bouclier que quand des gentes essayent de lutter contre le racisme en partant de leur propre vécu (en tant que minorité éthnique dans un pays qui fait croire à l’égalité des chances pour tous et essaye de nous noyer dans son universalisme bon enfant) alors que les attaques de bons fachos bien blancs les laissent de marbre (ou du moins ne les fait pas s’engager dans une vendetta politique). On aurait pu croire qu’il n’y avait dans cette histoire qu’une simple erreur de concept.
Ce qui a frisé la plupart de nos compagnons à peau blanche était la soi-disant interdiction d’entrée à ce moment pour eux-mêmes. Tout de suite on a entendu "camp anti-blanc" avec le refrain qui va bien « si on faisait le contraire, on nous traiterait de raciste ». Évidemment que oui*. Mais dans notre cas, ce camp qui avait lieu au Centre International de Séjour de Reims n’avait qu’une non mixité ouverte seulement aux « personnes ayant subi le racisme d’État ». Même avec des œillères d’universalistes qui pensent sincèrement qu’on a toutES les mêmes chances et que nous sommes vraiment touTes égaux dans la société française, on aura du mal à me faire croire que ce ne sont pas les personnes racisées qui sont les premières à faire les frais de ce racisme systémique. A l’embauche, dans la rue, nos exotismes nous déclarent comme « autres » qui venons forcement d’ailleurs (« non mais tu viens d’où à la base ») et avec cette certitude que, quel que soit le degré de génération sur ce sol national, on n’aura jamais autant de valeur et de légitimité que le mythe du français de souche cher à l’extrême droite.

Les 180 participantEs ont pu, pendant presque 4 jours, dialoguer dans différents conférences/débats et autres ateliers sur le fait d’être vuEs comme autres sur le sol français, et ainsi mieux comprendre et mettre à jour les raisons et causes de ce racisme qui ne veut pas partir totalement (justement peut-être parce qu’on se refuse d’en parler...).

A part la pseudo action des blancs-becs du front national qui voyaient ici une tribune pour faire leur beurre (mais ils devraient quand même réviser leurs cours d’histoire : hilter avait avant tout une idéologie raciste avant de construire des camps #jesaisfaireunsloganpopulistepourmonpartiedenazis), on a quand même retrouvé beaucoup de gens de gauche (la vraie et la soi-disant) et même un peu plus loin (majoritairement blancs mais pas que) outrés par la tenue de ce camp.
Alors je me permettrai un petit parallèle rigolo qui pourra mettre mal à l’aise les plus ouverts d’esprit.
Ce genre de comportement d’attaquer des personnes minorisantes qui décident juste de se regrouper entre elleux pour comprendre l’étendue d’une réalité qu’elleux vivent au quotidien et qui leur amène plus ou moins de tracas, me fait totalement penser à « la manif pour tous » (marque homophobe déposée).
On a des personnes (blanches / hétérosexuelles) qui sont outrées que l’on puisse faire quelque chose dans leurs dos alors qu’elles sont tout (société européenne / société hétéropatriarcale) et qui décident de montrer leur colère face à cela (pétition/ mouvement crade). Elles n’acceptent pas que les autres (non blancs / homosexuels) puissent choisir leur destin (lutte contre le racisme / accès au mariage,adoption,filiation) alors que notre soi-disant société là-encore universalisante nous dit qu’on est tous égaux (contrôle au faciès, subalternisation, criminalisation, peur / si t’es homo tu ne pouvais pas te marier, ne pouvais pas adopter et ne peux toujours pas faire de PMA).
Fort heureusement, malgré tous ses white tears°°°, le camp a bien eu lieu (avec en plus pas mal de choses sur les féminismes).

Dans la deuxième partie, on s’attaquera plus au problème qu’a la France avec le grand méchant "communautarisme" et décrypterons le fond de la non mixité racialisé.


P.-S.

° « race » : réappropriation du terme mais sans jamais confirmer la théorie eugéniste. Surtout utilisée par les blacks féministes qui suivent une vision intersectionnale des luttes (classe, genre, sexe, race)

°°féminazie : titre donné très souvent aux simples féministes qui ne lâchent rien par rapport à leurs luttes contre le sexisme et le patriarcat et que les male tears font rire

°°°white tears : comme les male tears(larme de mâle quand un mec pleurniche contre les effets du féminisme ou parce qu’on prend pas en compte la dureté de sa vie de dominant) mais pour les blancs (possible combo male white tears (qui fera encore plus rire les "féminazie°° intersecionnalisante")


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