Affaire du potentiel géothermique de Bure : les associations demandent à l’État d’invalider le périmètre d’implantation de Cigéo
Pour pouvoir implanter Cigéo, ce centre d’enfouissement des déchets radioactifs les plus dangereux, l’Agence pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a occulté un important potentiel géothermique présent dans le sous-sol. Ce faisant, elle a « oublié » de se mettre en conformité avec les critères de sûreté.
Aujourd’hui, le Tribunal de grande instance de Nanterre a refusé de prendre acte de la faute commise par l’Andra dans sa mission d’information, en déclarant que les associations n’avaient pas d’intérêt à agir.
Les associations Réseau "Sortir du nucléaire", Bure Stop 55, le CEDRA, l’ASODEDRA, Les Habitants Vigilants de Gondrecourt et MIRABEL Lorraine Nature Environnement, à l’origine du recours contre l’Andra, refusent de s’en tenir là. Le périmètre d’implantation de Cigéo ayant été déterminé sur des bases erronées qui niaient la ressource géothermique, elles demandent à l’État l’abandon du projet.
Un site pour l’enfouissement choisi en dépit des règles de sûreté
Ces déchets radioactifs resteront dangereux pour des centaines de milliers d’années. Pour déterminer un lieu destiné à leur enfouissement, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a mis en place des critères officiels : entre autres, ne pas enfouir de déchets à l’aplomb d’une ressource géothermique présentant un intérêt particulier. Une fois le site construit, l’ASN reconnaît le risque d’une perte de mémoire de celui-ci, qu’elle situe « raisonnablement au-delà de 500 ans » [1]. Si la ressource géothermique venait à être exploitée dans plusieurs siècles [2], les conséquences de la perforation des alvéoles de stockage et, de ce fait, des conteneurs de déchets seraient gravissimes pour la santé et la sécurité des populations.
Or, le sous-sol de Bure renferme une ressource géothermique conséquente, connue des géologues depuis les années 1980. Il aurait logiquement dû être déclaré impropre à l’enfouissement… mais l’Andra, depuis l’implantation du laboratoire de Bure, s’est efforcée de cacher l’existence de cette ressource ! Pourtant, celle-ci, mise en évidence par les analyses du docteur en géologie Antoine Godinot, est maintenant officiellement reconnue par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) et le cabinet d’experts indépendants GEOWATT ; même l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) reconnaît son caractère exploitable, le type de géothermie permettant une valorisation directe de la chaleur dans des réseaux de chauffage urbains, des industries ou des serres agricoles ! Les associations Réseau "Sortir du nucléaire", Bure Stop 55, le CEDRA, l’ASODEDRA, Les Habitants Vigilants de Gondrecourt et MIRABEL Lorraine Nature Environnement ont donc assigné l’Andra en justice pour faute, afin qu’elle réponde de ses manipulations.
N’en déplaise à l’Andra, la ressource géothermique est bien là !
Aujourd’hui, les associations sont scandalisées par la décision du tribunal, qui, tout en mésinterprétant leurs demandes, vient de déclarer qu’elles n’auraient pas d’intérêt à agir. Selon ce jugement, seules les autorités publiques pourraient donc engager la responsabilité de l’Andra pour faute !
Les associations envisagent donc de faire appel. Quoi qu’il en soit, ce jugement ne remet pas en cause l’existence de la ressource géothermique qui, grâce à la procédure lancée par les associations, est désormais communément admise.
Le périmètre d’implantation de Cigéo, basé sur des données erronées, doit être invalidé !
En 2010, la « Zone d’Intérêt pour la Reconnaissance Approfondie » (ZIRA), cette zone choisie pour implanter le centre d’enfouissement Cigéo, avait été validée par l’État sur la base d’un avis rendu par l’IRSN en 2009. Cet avis se fondait lui-même sur les résultats présentés par l’Andra qui niaient la ressource géothermique de Bure, concluant donc que « le forage traversant le Trias réalisé au centre de la zone permet[tait] de confirmer l’absence de potentiel géothermique exploitable à son aplomb ». Depuis, suite au travail mené par les associations, de nouveaux rapports et expertises sont venus contredire cet avis. En 2013, l’IRSN lui-même est revenu sur ses affirmations en admettant que « la formation argilo-gréseuse du Trias inférieur présente donc un potentiel géothermique » et reconnaissant la possibilité de son exploitation [3]. Le périmètre d’implantation de Cigéo a donc été déterminé sur des bases erronées. Les associations viennent d’écrire à l’Élysée, au Ministère de l’Écologie et à l’Andra pour leur demander d’invalider ce périmètre et de stopper au plus vite le projet Cigéo.
Compléments d'info à l'article